Le monarque et l’écrivain, rencontre autour d’un chevreuil

Une rencontre atypique entre le roi Louis XVI et François-René de Chateaubriand aux abords du Pavillon de la Muette. 

Les « Mémoires d’outre-tombe » sont un modèle de biographie, qui nous invite à suivre les tribulations d’un jeune aristocrate breton, durant les années qui ont précédé l’effondrement de l’ancien régime.

François-René de Chateaubriand y raconte notamment avec esprit (livre 4, chapitre 8) sa vie solitaire à Paris, vers l’automne 1787 ou au début de l’année 1788.

Son frère, ambitieux pour lui, mais embarrassé de ses manières provinciales et de sa timidité, le presse de se faire présenter à la cour et lui prédit qu’à défaut de débuter de manière brillante, il mourra « inconnu, inutile à lui et à sa famille », ce qui ne manque pas de piquant quand on connait la postérité de l’écrivain !

Après une présentation à Versailles où le roi, parmi un nombreux cortège, le regarde et lui rend son salut sans lui adresser une parole, Chateaubriand est convié à venir chasser avec Louis XVI dans la forêt de Saint Germain en Laye.

En dépit de ses préventions pour les mondanités, c’est en habit gris, veste et culotte rouges, couteau de chasse au côté et petit chapeau à galon d’or que l’écrivain se rend au point de ralliement situé au château du Val en forêt de Saint Germain en Laye.

 


Cerné par les meutes à peine contenues, les hennissements des chevaux et le bruit des cors, on lui attribue pour son malheur une mauvaise jument, ombrageuse et pleine de caprice.

Son apprentissage de courtisan débute mal, puisque la vilaine monture, immaitrisable, heurte d’abord le cheval d’une femme qu’elle faillit culbuter, puis l’isole bientôt de l’équipage royal en l’entrainant au galop, dans une longue percée à travers des bois déserts.

Mais voilà que le Pavillon de La Muette s’élève au bout de l’allée et l’esprit romanesque de Chateaubriand s’enflamme aussitôt à sa vue « en songeant à ces palais répandus dans les forêts de la couronne, en souvenir des rois chevelus et de leurs mystérieux plaisirs ».

Un coup de feu part, et l’écrivain se retrouve bientôt juste à l’endroit où un chevreuil vient d’être abattu. Le roi paraît. « Je saute à terre, d’une main poussant en arrière ma cavale, de l’autre tenant mon chapeau bas. Le Roi regarde ; il avait besoin de parler ; au lieu de s’emporter, il me dit avec un ton de bonhomie et un gros rire : « Il n’a pas tenu longtemps. ». C’est le seul mot que j’ai jamais obtenu de Louis XVI ».

On fut bien sûr étonné de trouver l’écrivain causant seul avec le roi, et cette rare rencontre en tête à tête avec le souverain rehausse le prestige du courtisan débutant, qui ne sut malheureusement pas profiter de sa bonne fortune, puisqu’il s’éclipse sans vouloir suivre à Versailles les festivités d’après-chasse, au grand désespoir de son frère.

« On me demandera ce que devint l’histoire de ma présentation. Elle resta là. – Vous ne chassâtes donc plus avec le Roi ? – Pas plus qu’avec l’empereur de la Chine – Vous ne tirâtes donc aucun parti de votre position ? – Aucun.»

Il est plaisant de noter que le Pavillon de La Muette fut le lieu précis de cette improbable rencontre entre Louis XVI et Chateaubriand, autour du corps encore chaud d’un chevreuil, et que ce souvenir a suffisamment marqué l’écrivain pour trouver place dans un de ses plus célèbres récit.

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